L’art du gonflable
Dans le monde de l’art moderne, le gonflable a planté ses racines grâce à l’œuvre de Piero Manzoni, celle d’Otto Piene du groupe ZERO qui symbolise, pour ses artistes, le souffle de la création. Il faut aussi citer Iain Baxter qui réinterprète, en version gonflable, les œuvres de Donald Judd ou de celles Marck Rothko, tandis que les installations flottantes de Christo nous interpellaient déjà. En 1954, à la fin de sa carrière, l’architecte Frank Lloyd Wright avait imaginé l’Airhouse, un exemple très avancé et abouti d’architecture gonflable, composé de coupoles hémisphériques en nylon recouvert de vinyle léger mais très résistant, faisant écho aux dômes et bâtiments sans fondation de Richard Buckminster Fuller. L’art du gonflable a rejoint les recherches utopiques et critiques sur l’architecture pneumatique qui obtiendra une large reconnaissance grâce à des expositions d’envergure, comme celle du groupe Utopie, « Structures Gonflables ». Un lien se tisse alors entre les recherches industrielles et celles des nouveaux créateurs, concernant notamment l’architecture de l’éphémère… Car son montage simple et rapide permet de réaliser des installations écologiques et mobiles.

©Yutaka Murata © Osaka Prefectural Expo 1970 Commemorative Park Office
Un design ludique
Au milieu des années 1960, des créateurs venus de l’architecture comme le collectif Aérolande et des artistes comme Bernard Quentin ont également imaginé de nouvelles pratiques sociales et expérimenté le plastique gonflable. Les formes mises au point sont tournées vers le futur, évoquent des structures moléculaires, avec des propositions modulables et une combinaison infinie. A la même époque, en 1967, un premier siège gonflable est réalisé en moulage par injection, en Italie. La fabrication du fauteuil Blow, dessiné par Jonathan De Pas, Donato d’Urbino, Paolo Lomazzi et Carlo Scolari, créateurs de l’iconique pouf Sacco, s’inspire de celle des matelas de plage et des jouets de piscine, tout en présentant des innovations. Quasar Khanh, quant à lui, est le seul designer à avoir créé une collection complète de vrais meubles meublants, faciles à déplacer, indoor et outdoor, avec des créations réinterprétant les formes classiques, comme les sièges de style Chesterfield. Dans sa ligne baptisée Aerospace, hommage à la conquête aérospatiale, outre le canapé dit Chesterfield, une chaise longue appelée Relax, des fauteuils nommés Saturne, Vénus, Neptune, Pluton, Apollo, Mars, un pouf Satellite, mais aussi des lampes, des plafonniers, des suspensions et même des cloisons gonflables. Deux modèles de luminaires ont été notamment vendus dans les grands magasins des Galeries Lafayette. La ligne Aerospace a connu un grand succès commercial, malgré son prix qui n’était pas bon marché. Elle est immortalisée dans plusieurs films français de l’époque comme Le Cerveau. Fabriqués en polychlorure de vinyle (PVC), translucide et coloré, reliés par un système de soudure à haute fréquence, très solide, les meubles sont assemblés à la main et certains au moyen d’anneaux métalliques. Faciles à transporter, l’utilisateur les met en forme lui-même avec un gonfleur.

©Centre Pompidou, MNAM-CCI, Dist RMN-GP/Georges Meguerditchian © DR
On the air today ?
Après le choc pétrolier des années 1970 qui met à mal l’industrie du plastique, le gonflable perd de son attrait. Depuis la fin des années 1990, il a retrouvé un regain d’intérêt auprès d’architectes comme Rem Koolhaas et Cecil Balmond, Kengo Kuma ou Grimshaw Studio qui réalisent des pavillons d’exposition temporaire en plastique rigide de type ETFE. Une autre bonne raison de voir cette exposition ? C’est de visionner en boucle l’extrait du film La Decima Vittima d’Elio Petri, où les acteurs, dont Marcello Mastroianni - fait rarissime, il est teint en bond – sont assis sur des fauteuils gonflables. Et vivent le design et le cinéma des années 60 !
Contact :
Jusqu’au 14 février 2022,
à la Cité de l’Architecture et du Patrimoine
Palais de Chaillot, Trocadéro
75116 Paris
www.citedelarchitecture.fr

©Hans Hollein

©G.A. Stevens 1974

©Michel Moch

©A.J.S. Aérolande © Adagp, Paris 2021

©Robert Hösl

©Image by Rasmus Hjorstshoj & BIG – Bjarke Ingels Group

©Library of Congress

©AZC Architectes
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