Un intérieur teinté du mystère de Piero Fornasetti

Dans une déclinaison de visages, de noir et blanc et d’architecture, l’artiste italien Piero Fornasetti incarne un code graphique singulier, qui vient orner le mobilier de la maison. Onirique, le motif symbolise l’intégration du classique dans le surréalisme.

La table Architettonico incarne les différentes obsessions de l’artiste, entre les lignes architecturales du plateau en céramique et le visage sur le piètement. Un meuble graphique, qui apporte du caractère à une pièce.

Un artiste rebelle, sur fond de surréalisme

Né en 1913 à Milan, Piero Fornasetti est un artiste aux multiples talents, s’essayant à la peinture, à la sculpture ou au design. Après son expulsion de l’Académie des beaux-arts de Brera, où il suivait une formation de dessin depuis 1930, il expose à la Triennale de Milan. Le succès est presque immédiat, avec sa série de foulards en soie, imprimés de motifs surréalistes. Il lui faut attendre 1940, pour qu’une rencontre bouleverse sa vie, en collaborant avec le célèbre Gio Ponti. Inspiré par le maître, il tente d’insuffler à la production industrielle une part de créativité. Son goût pour les mises en scène le pousse à poursuivre sa recherche esthétique dans le domaine de l’architecture intérieure, notamment pour le casino San Remo, le paquebot Andrea Doria, ou la Casa Lucano. Sa production artistique est l’une des plus prolifiques du XXème siècle. A sa mort, en 1988, il laisse derrière lui plus de 11 000 pièces, comme preuve de sa créativité, que continue de perpétrer son fil Barbara Fornasetti dans le monde du design.

Dans un savant trompe-l’œil, cette théière utilise une mise en abîme, pour intensifier l’obsession étrange de Fornasetti pour ce visage. En porcelaine blanche, elle donnera une nouvelle dimension à l’heure du thé.
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Dans un savant trompe-l’œil, cette théière utilise une mise en abîme, pour intensifier l’obsession étrange de Fornasetti pour ce visage. En porcelaine blanche, elle donnera une nouvelle dimension à l’heure du thé.
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Son œuvre se caractérise par un style baroque, qui s’inspire de l’univers de la magie et de l’illusion. A travers un savant jeu de trompe l’œil, il ponctue ses réalisations de clin d’œil aux artistes de la Renaissance. Son goût pour la perspective le mène à créer des villes imaginaires, où l’invraisemblance est à l’honneur. Son motif décoratif favori reste le visage d’une femme, chanteuse lyrique du nom de Lina Cavalieri, dont il tombe sous le charme grâce à son illustration dans un magazine du XIXème siècle. Sa fascination est telle, qu’il réalise une série de thèmes et de variations (Tema e Variazoni), qui compte plus de 350 œuvres différentes. Il s’y retrouve une certaine peur du vide, où le motif se sature dans une accumulation de détails. Appréciant l’architecture néoclassique, il s’inspire de l’héritage gréco-romain, dans une vision comique et décalée. Utilisant le dessin comme un motif duplicable,  Piero Fornasetti réussit à créer un vocabulaire visuel, qui trouve son écho dans l’univers de la maison.

L’ensemble des douze assiettes en porcelaine « Adamo » permet de recréer la figure biblique d’Adam. De couleur or ou noir et blanc, ces assiettes peintes à la main peuvent également figurer Eve.
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L’ensemble des douze assiettes en porcelaine « Adamo » permet de recréer la figure biblique d’Adam. De couleur or ou noir et blanc, ces assiettes peintes à la main peuvent également figurer Eve.
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Une décoration aux accents oniriques et excentriques

Caractérisée par un travail sur le noir et blanc, l’œuvre de Fornasetti se prête à tous les types d’intérieurs, avec lesquels l’harmonie se fera avec discrétion. Cependant, l’univers de l’artiste crée un décalage entre les formes épurées du mobilier et l’exubérance des motifs décoratifs. L’effet surréaliste des trompe-l’œil et des perspectives crée de véritables tours de force dans le rendu du mobilier, en suscitant une atmosphère empreinte de rêveries. Si les thèmes se font classiques avec l’inspiration des modèles antiques ou historiques, leurs représentations s’orientent toujours vers le détournement, pour créer de l’inattendu. Il s’agit d’ouvrir le champ de l’imaginaire, pour capter le regard dans une sorte de fascination hypnotique. D’une certaine manière, l’esthétique de l’artiste se fait le lieu d’un combat entre le vrai et le faux. Ainsi, le style Fornasetti se compose par petites touches, pour éviter une surcharge qui étoufferait l’ambiance. Si le total look vous tente, n’hésitez pas à jouer la carte de la fantaisie et de l’audace, mais ce type de réalisation demande une certaine maîtrise. Son succès dans les années 50 confère au mobilier une touche vintage, qui devient un incontournable pour les aficionados d’une ambiance fifties.

Comme son nom l’indique, « Piede romano » représente un pied dans la plus grande tradition de l’Antiquité romaine. En porcelaine, ce porte-crayon peint à la main d’une couleur dorée apporte une véritable touche de luxe originale sur un bureau.
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Comme son nom l’indique, « Piede romano » représente un pied dans la plus grande tradition de l’Antiquité romaine. En porcelaine, ce porte-crayon peint à la main d’une couleur dorée apporte une véritable touche de luxe originale sur un bureau.
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La répétition d’un même modèle donne une impression de mélancolie romantique, mais n’hésitez pas à choisir des images contrastées, pour gagner en rythme. Le visage de Lina Cavalieri orne désormais l’intégralité des objets d’une maison, où son regard incarne le mystère et l’obsession. Toujours représentée dans une émotion particulière, elle se fait tantôt mutine, tantôt chagrine, se parant de milles et un costumes. Le papier peint s’imprime de son visage, comme autant de paires d’yeux, qui vous pourchassent pour mieux vous hypnotiser. Avec le temps, elle est devenue une sorte de Mona Lisa moderne, qui inspire la même évasion.

Ce meuble trumeau-bar « Grand Coromandel » représente l’amour de Fornasetti pour les jeux de mots, avec ce gallicisme trompeur. Initialement conçu pour Gio Ponti, il s’agit d’un meuble hybride entre buffet, bar et bureau.
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Ce meuble trumeau-bar « Grand Coromandel » représente l’amour de Fornasetti pour les jeux de mots, avec ce gallicisme trompeur. Initialement conçu pour Gio Ponti, il s’agit d’un meuble hybride entre buffet, bar et bureau.
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D’autres thèmes récurrents reprennent le principe de la variation, pour créer un vocabulaire visuel riche. Le motif solaire apportera une touche de gaité et de bonne humeur, grâce à son visage souriant et les lignes dynamiques de ses rayons. La montgolfière et le ciel invitent l’esprit à partir en voyage, où détente et relaxation sont au centre de toutes les attentions. Un meuble revêtu d’un dessin d’architecture évoque une mise en abime, pour un effet saisissant. Quelque soit le motif, il incarnera la puissance créatrice de Fornasetti, et laisse libre cours à une imagination débridée dans la vie quotidienne.

Si deux mains viennent dissimuler son visage, la chanteuse lyrique n’en reste pas moins reconnaissable sur ce coussin. Invitation au rêve, ces mains semblent prêtes à accueillir dans leur creux votre tête, pour un instant de confort.
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Si deux mains viennent dissimuler son visage, la chanteuse lyrique n’en reste pas moins reconnaissable sur ce coussin. Invitation au rêve, ces mains semblent prêtes à accueillir dans leur creux votre tête, pour un instant de confort.
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Envouté par la beauté incandescente de Lina Cavalieri ou charmé par le caractère hypnotique du motif, vous ne pourrez résister longtemps à son charme. Sachez que chacune des productions Fornasetti sont fabriquées dans l’atelier du maître à Milan, sous un contrat de licence, qui permet de mettre en valeur un travail artisanal.

www.fornasetti.com
www.palazzetti.com
www.leclaireur.com

Le visage de Lina Cavalieri n’est pas la seule obsession de Fornasetti, comme nous le prouve ses serre-livres en métal. La feuille d’or permet de dessiner le double visage de la divinité romaine Janus.
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Le visage de Lina Cavalieri n’est pas la seule obsession de Fornasetti, comme nous le prouve ses serre-livres en métal. La feuille d’or permet de dessiner le double visage de la divinité romaine Janus.
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Article publié le 11 juin 2012

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