Né en 1934 à Tokyo, Shiro Kuramata commence des études d’architecture, avant de rentrer à l’école de design Kuwazawa. Avec son diplôme en poche en 1956, il oriente sa carrière vers l’architecture d’intérieur et la création d’un mobilier, qui éveille un intérêt particulier pour son choix unique des matières. Ainsi, il est l’un des premiers designers à mettre la lumière au cœur de son œuvre, grâce notamment à la transparence du verre. Il aime à insuffler à un mobilier familier une aura d’étrangeté, grâce à un simple vocabulaire esthétique, incarné par l’épuré. Avec humour et poésie, il confère à ses œuvres une légèreté plastique, qui donne ses lettres de noblesse au minimalisme. Décrit comme un poète de la conception, Shiro Kuramata est également reconnu comme architecte d’intérieur, en réalisant notamment les vitrines d’Issey Miyake à Tokyo, New York ou Paris.
Inspiré par l’artiste Donald Judd, le designer japonais réalise deux commodes « Side 1 » et « Side 2 » en 1970, dont les tiroirs composent un ensemble géométrique. Appréciant les matières nobles, il travaille avec un bois de frêne teinté. L’accent est mis sur la forme, qui se réduit à un simple volume dans lequel il n’est plus question de temps et d’espace. Le meuble possède une valeur minimaliste, où se joue le dépouillement de toutes inspirations expressives. Soulignée par une bichromie en noir et blanc, la commode est issue d’une volonté de s’inscrire dans l’éternel. Le meuble se conçoit comme un tout, où l’œil ne s’attarde pas sur des détails superflus, puisque la commode en est exempte. La lecture se fait de haut en bas et de bas en haut, où la composition des tiroirs suffit à créer un rythme hypnotique.
De forme sinueuse, le meuble s’inscrit dans la courbure, qu’elle soit de face (« Side 1 ») ou de profil (« Side 2 »). Dans l’idée d’une colonne, les tiroirs se succèdent dans une esthétique de la pile, où se pose un questionnement sur la perversité de la perspective. En effet, alors que chacun des éléments sont d’une dimension identique, l’œil tend à percevoir des différences entre eux. Cette fausse impression permet de créer un ensemble fluide, qui donne un sentiment de vie substantiel. Dans un esprit moderne, il appose sur chaque tiroir un bouton d’acier, qui marque le déplacement de la courbe en pointillé. Ne perdant pas le point de vue fonctionnel, la commode est montée sur quatre roulettes, afin de permettre son déplacement dans l’ensemble de l’intérieur.
Editées par Cappellini, les commodes « Side 1 » et « Side 2 » correspondent à un empilement de tiroirs au code graphique épuré. Dans un état d’apesanteur, le meuble semble en dehors de tout espace/temps, comme une rêverie poétique de Shiro Kuramata.
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