Gio Ponti, le « Parrain » du design italien

Avec la redécouverte de l’histoire de Poltrona Frau, la figure du designer italien Gio Ponti émerge comme la tête de proue d’un mouvement entre tradition et modernisme, dont la création illustre l’esprit de son temps.

Réédité par Molteni&C, ce fauteuil fut réalisé en 1953. Les formes de l'assise et du dossier reprennent celle de la courbure du dos, afin d’offrir un confort optimal. Les accoudoirs sont inclinés afin que le corps puisse se laisser aller à un pur moment de détente.
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Pour fêter son centenaire, Poltrona Frau ouvre les portes de son histoire dans une exposition à Tolentino. Un événement qui invite à découvrir ou redécouvrir tous les grands noms de la célèbre maison, comme le designer Gio Ponti. Considéré comme le parrain de la renaissance italienne du design d’après-guerre, il réalise une carrière phénoménale par sa richesse, devenant tour à tour poète, peintre, rédacteur en chef et même architecte. Avec les deux guerres successives, l’Italie est ravagée par la destruction, nécessitant une refonte totale du pays. Le Plan Marshall des Etats-Unis apporte une souffle vigoureux à l’industrie italienne, qui sera influencée par la culture américaine. La réussite de Gio Ponti est d’avoir senti ce changement social, en l’intégrant à sa conception toujours dans l’air du temps. Ses créations reflètent l’état d’esprit d’une époque, qui passe de l’artisanat traditionnel à une production de masse, où le consommateur en est le cœur.

Conçue pour son confort personnel, cette commode de Gio Ponti appartenait à son propre mobilier. Molteni&C la réédite en hommage à ses lignes épurées, où les tiroirs sont revêtus de panneaux de bois, dans un heureux hasard.
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Conçue pour son confort personnel, cette commode de Gio Ponti appartenait à son propre mobilier. Molteni&C la réédite en hommage à ses lignes épurées, où les tiroirs sont revêtus de panneaux de bois, dans un heureux hasard.
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Né en 1891, Gio Ponti sort diplômé de l’Ecole Polytechnique de Milan, avant de devenir architecte au sein de l’agence d’Emilio Lancia et Mino Fiocchi. Il y affirme un style, qui prend sa source dans une harmonisation entre la forme et la fonction, avec une utilisation appropriée des matériaux. Pendant toute sa vie, Gio Ponti n’aura de cesse de faire des va-et-vient entre design et architecture. Il réalise notamment dans les années trente, une série de maisons à Milan, aux noms de « domuses », comme une incarnation de son travail. Si elles ressemblent à des maisons typiquement milanaises à l’extérieur, l’intérieur se fait résolument moderne, avec des espaces flexibles et un mobilier modulable. Son œuvre phare restera certainement la Tour Pirelli, qu’il réalise en 1956, devenant une icône de la ville, par sa forme graphique.

Dessiné en 1946 pour le verrier Venini, ce lustre en verres colorés est réédité depuis 1989. Avec ses bras multiples, l’accent est mis sur un jeu de couleurs et de transparence, qui vient refléter la lumière pour sa meilleure diffusion.
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Dessiné en 1946 pour le verrier Venini, ce lustre en verres colorés est réédité depuis 1989. Avec ses bras multiples, l’accent est mis sur un jeu de couleurs et de transparence, qui vient refléter la lumière pour sa meilleure diffusion.
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De 1923 à 1930, Gio Ponti devient le directeur artistique d’un fabricant de céramique, Richard Ginori. Il transforme intégralement le mode de fonctionnement de l’entreprise, dans l’esprit du design industriel. L’ensemble de la création s’adapte à une production en série, avec un décor de formes simples aux motifs néoclassiques. Une entreprise couronnée de succès, puisque qu’en 1925, il obtient le grand prix de l’Exposition universelle de Paris. La même année, il est nommé directeur de la Biennale de Monza, un honneur qu’il conservera jusqu’à sa mort, en 1979. Son implication est telle qu’en 1933, la Biennale se déplace à Milan, pour devenir la Triennale d’art et d’architecture moderne. Une institution culturelle dont le rayonnement international lui confère le statut de référence dans le domaine de l’innovation.

La légèreté est au cœur de la chaise Superleggera, avec un poids plume de 1,7 kg. Cassina la propose dans une bichromie de noir et blanc, qui met en valeur sa forme d’un classicisme sans âge, où la finesse s’inscrit dans une structure en frêne.
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La légèreté est au cœur de la chaise Superleggera, avec un poids plume de 1,7 kg. Cassina la propose dans une bichromie de noir et blanc, qui met en valeur sa forme d’un classicisme sans âge, où la finesse s’inscrit dans une structure en frêne.
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Grâce à Ugo Ojetti, un ami journaliste, Gio Ponti n’en oublie pas ses premiers amours, en créant la revue d’architecture Domus. Reconnue comme une référence mondiale, elle est le lieu d’une conception dite « Novocento », où l’histoire du style architectural italien se reflète dans le prisme de la modernité. Directeur de 1928 à 1979, il joue un rôle de premier ordre dans l’évolution du design et de l’architecture d’après-guerre, en encourageant des projets modernes et novateurs. En collaboration avec Fontana, il conçoit une série de meubles et de luminaire, avant d’en devenir le directeur artistique, en 1933. Il y crée notamment une suspension composée d’une structure en laiton chromé, où des disques de cristal et de miroirs viennent refléter la lumière, en assurant se meilleure distribution. Comme en architecture, Gio Ponti aime travailler avec les matières, en créant pour le verrier Venini des bouteilles ou des lustres en verre de Murano, où la transparence se joue de la couleur.

Déclinaison de la Rosalinda, cette table basse, réédite par Molteni&C, est munie d’un verre transparent, pour mettre en valeur sa structure de treillis en acier émaillé. Datée de 1954, elle fut créée pour la Villa Arreaza, de Caracas, dans un jeu sur la couleur.
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Déclinaison de la Rosalinda, cette table basse, réédite par Molteni&C, est munie d’un verre transparent, pour mettre en valeur sa structure de treillis en acier émaillé. Datée de 1954, elle fut créée pour la Villa Arreaza, de Caracas, dans un jeu sur la couleur.
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Pour La Pavoni, en 1948, Gio Ponti conçoit une machine à expresso, qui marque un véritable tournant dans le design de l’appareil. A l’origine, la machine était positionnée à la verticale ; cette fois, elle sera à l’horizontale, pour une forme résolument moderne, qui conserve un certain traditionalisme. Constituée de cylindres chromés, elle rappelle le style industriel, cher au designer. De ce fait, cette machine a expresso sera exportée dans le monde entier, devenant un symbole emblématique de la « dolce vita », pour les adolescents. En outre, sa conception industrielle du design va se développer autour de sièges, comme le fauteuil Distex de 1957 ou la chaise Superleggera de Cassina, en 1955. Il s’inspire de la chaise traditionnelle Chiavari comme modèle, mais en l’adaptant avec simplicité et épuration.

Tout au long de sa carrière, Gio Ponti incarne la transition d’une époque, faite de bouleversements et de changements, qui conserve des liens avec le passé et expérimente de nouvelles idées dans une conception tournée vers le futur.

Symbole de la « dolce vita », cette machine expresso La Pavoni fut dessiné par Gio Ponti, en 1948. Nommée « La Cornuta » pour son groupe de distributeurs apparent, elle incarne un style industriel.
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Symbole de la « dolce vita », cette machine expresso La Pavoni fut dessiné par Gio Ponti, en 1948. Nommée « La Cornuta » pour son groupe de distributeurs apparent, elle incarne un style industriel.
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www.poltronafrau.com
www.cassina.com
www.venini.it
www.lapavoni.it
www.molteni.it

Article publié le 2 mai 2012

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